mardi 11 septembre 2012

Justice, un cas concret: le mariage pour les personnes du même sexe

Chers élèves, chers lecteurs,
Comme vous êtes déjà plongé dans les profondeurs abyssales des thèmes du concours commun d'entrée en IEP, soit la « science » et la « justice », nous vous invitons aujourd'hui à tirer de l'actualité un exemple concret sur ce dernier thème: pour ce faire, voici un extrait et un article du journal catholique "La Croix" dans lequel l'actuelle garde des Sceaux, Christiane Taubira expose le projet de loi sur le mariage homosexuel.

Christiane Taubira : « Le mariage pour tous répond à une exigence d’égalité »
La garde des Sceaux présente, en exclusivité pour « La Croix », ce que seront les grandes lignes du projet de loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples de même sexe.

La Croix.  Ouvrir le mariage aux personnes de même sexe change profondément le sens d’une institution qui a traversé les siècles. Pourquoi n’avoir pas plutôt choisi d’étendre les droits des personnes pacsées ?
Christiane Taubira  : Le mariage est en effet une institution ancienne qui occupe une place très particulière dans le code civil. C’est un acte juridique solennel, inventé pour structurer la société, qui codifie plus strictement que d’autres formes d’union (le pacs et le concubinage) les conditions de la vie commune. Réformer le mariage en l’ouvrant aux couples de même sexe fait, il est vrai, débat. Mais, vous savez, les réformes touchant au mariage se sont toujours faites dans un climat passionnel.
En 1884, lorsque le divorce a été introduit, il a provoqué des débats extrêmement violents et intenses : il y avait là déjà une confrontation philosophique et anthropologique évidente entre ceux qui avaient une perception plus religieuse du mariage et ceux qui, sous l’influence de Lumières, en avaient une perception plus laïque. Nous sommes donc bien conscients de toutes les dimensions philosophiques et anthropologiques entourant le mariage. Mais nous estimons qu’elles ne peuvent venir percuter l’exigence d’égalité. C’est à cela, à cette exigence d’égalité, que nous satisfaisons avec ce projet de loi.

De plus, nous vous invitons à lire l'article ci-dessous, riche d'enseignement sur une des très nombreuses fonctions de la justice :

Comment le code civil va être remanié ?
Rédigé actuellement par la chancellerie en concertation avec la ministre déléguée à la famille, le projet de loi doit être présenté fin octobre en conseil des ministres.
L'ouverture du mariage aux couples de même sexe constitue une révolution sociétale, mais aussi juridique. Une telle réforme va en effet entraîner la réécriture de nombreux articles du code civil. 
À commencer par l’article 144 qui codifie ainsi le mariage : « L’homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant dix-huit ans révolus. »  L’article pourrait être modifié comme suit : « Le mariage peut être contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe. Nul ne peut le contracter avant dix-huit ans. »  (1) 
La chancellerie ne devrait pas s’aventurer à définir plus avant le mariage, ce dernier n’ayant jamais jusqu’ici fait l’objet d’une définition plus précise que l’article 144. Les droits et obligations attachés au mariage devraient être strictement les mêmes, qu’il s’agisse d’un couple homosexuel ou hétérosexuel.
L’autre grand volet de la réforme concerne la reconnaissance du lien de filiation. La chancellerie prévoit d’ouvrir l’adoption aux couples de même sexe. Ces derniers pourront déposer une demande conjointe d’adoption en vue d’accueillir un enfant abandonné, placé ou né sous X. 
Les homosexuels pourront aussi déposer une demande d’adoption individuelle afin de devenir « parent » de l’enfant biologique de leur conjoint. Il leur faudra pour cela entamer une procédure d’adoption (simple) afin de figurer sur l’état civil de l’enfant. 
Ce qui leur ouvrira des droits plus étendus que ceux prévus aujourd’hui dans le cadre de la délégation d’autorité parentale puisqu’ils pourront, en plus de l’exercice de l’autorité parentale, transmettre leur nom et leur patrimoine à l’enfant adopté.
La communauté homosexuelle réclame plus et souhaite l’établissement d’une filiation automatique – sans passer par une procédure d’adoption. De même qu’il existe aujourd’hui une « présomption de paternité », les militants homosexuels appellent à la création d’une « présomption de parentalité » qui leur permettrait d’établir une filiation immédiate avec l’enfant. Des amendements seront probablement déposés en ce sens lors du débat parlementaire.

(1) Par ailleurs, tous les articles faisant référence aux personnes mariées seront réécrits afin que les termes « homme » et « femme » soient remplacés par « époux ».
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Les parlementaires font leurs propositions
Après le rejet, en juin 2011, de la proposition de loi légalisant le mariage homosexuel du député Patrick Bloche (PS, Paris) – l’UMP était alors majoritaire à l’Assemblée –, la sénatrice Esther Benbassa (Europe Écologie-Les Verts, Val-de-Marne) vient à son tour de déposer un texte qu’elle présentera mercredi 12 septembre à la presse en présence de l’avocate Caroline Mécary et des universitaires Daniel Borrillo et Didier Eribon.
À la différence du projet en préparation au gouvernement, ce texte – cosigné par 11 sénateurs – ouvre l’accès à l’aide médicale à la procréation aux couples de femmes.
Article de MARIE BOËTON du journal La Croix

Enfin, bien que vous prépariez le concours d'entrée en IEP et non en fac de Droit, il est utile que vous connaissiez l'existence de quelques outils exploités par le monde de la justice : ex. : http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do?cidTexte=LEGITEXT000006070721
Bon courage
A. Cuvelier